Fête volée trois fois

En ce premier samedi de décembre, les enfants sont contents : ils jouent déjà avec leurs jouets de Noël dans le TGV qui les ramènent de Paris, où ils sont allés en famille faire les courses de fin d’année. Pendant ce temps, les parents sont plongés dans leurs i-pad et tablettes qu’ils se sont peut-être aussi offerts à cette occasion.

Ainsi, ils sont donc volés trois fois ces enfants.
Ils se sont fait dérober la joie de l’attente du jour de fête, et de la surprise de la découverte. Il est vrai qu’ils sont facilement blasés, nos chérubins, et qu’ils ne manquent pas de reprocher aux parents et grands-parents en direct et le jour-même que leurs cadeaux sont pourris, ringards et décevants. On peut comprendre que les adultes anticipent et mettent toutes les chances de leur côté pour éviter l’affront effronté. Le cadeau n’existe plus donc. Il est remplacé par un dû en bonne forme et sur-mesure de l’envie du moment.
Second vol : celui du plaisir d’être ensemble, non pas côte-à-côte chacun dans sa bulle, mais en famille dans des liens ludiques, jubilatoires, complices, inattendus.
Dernier vol : plus lointain, perdu dans les strates enfouies d’une culture qui mute ou fuit en avant vers l’implosion, l’avenir nous le dira, celui du sens même de la fête de Noël : la joie célébrée, vécue, chantée, dans les cadeaux et autour d’une tablée chaleureuse, la joie d’être visité par Dieu en personne au cœur des clair obscurs de nos vies. Mais c’est une autre histoire…
Enfants trois fois lésés donc. Endommagés.

Marie-Christine Bernard
Décembre 2012