Perdre son temps à en gagner

Gagner du temps : c’est LA raison principale avancée pour vanter les mérites des changements incessants qui nous sont imposés. Des bornes automatiques chargées de délivrer des billets de transport, aux quelques minutes rognées sur un trajet TGV ; des caisses sans caissières aux tablettes super-branchées, (vous savez, ces espèces de couteaux suisses intergalactiques capables de toute sorte de choses dont on se passait bien jusque là) (mais qui ne savent pas couper une tranche de pain) ; des plats tout préparés aux goûters anniversaires fournis clefs-en-main…la liste est longue de ce qui doit nous faire gagner du temps. Mais ce temps gagné, pour quoi l’est-il ? Ne voyons-nous pas que du temps, lorsque l’on est engagé dans une vie familiale et professionnelle ordinaire, nous en manquons de plus en plus ? En pratique, le temps gagné se trouve absorbé par trois activités que le fait d’en gagner génère :

– se familiariser avec les derniers gadgets (ludiques et chronophages) et paramètres technologiques : adaptation en continu tant le rythme des évolutions techniques ne laisse aucun répit.
– tenter de gérer les multiples relations produites par les réseaux via l’internet, dont le nombre est en croissance exponentielle.
– se reposer des tensions nerveuses et de la fatigue mentale que ne manquent pas d’apporter l’impératif de réactivité, de simultanéïté et d’instantané.
Si les avantages du gain de temps tout azimut existent, on peut quand même se demander si les inconvénients ne l’emporteront pas…au bout du compte. Mais je suis là dans du long terme…un peu hors-sujet technologique, sans doute.

Marie-Christine Bernard
juin 2012