Ruines

Sous le toit de cette maison, on a vécu, on a mangé et bu, on a travaillé, on a fait l’amour, et donné naissance à des enfants, on a ri et on a crié, et bavardé et souffert, et reçu quelque courrier, et on a prié, et on assuré son ouvrage quotidien, et fait la fête et pris le deuil, on a lâché son dernier souffle aussi. Sur combien de générations ? Nul ne sait. Mais, ici, pendant des décennies, la vie battait son plein. La ferme, le moulin, les bois et les haies nourrissaient des habitants en chair et en os, de ceux qui connaissent et les lieux et les gens et les bêtes et les plantes  alentours comme leur poche.

Comme des milliers d’autres dans notre beau pays, la voilà abandonnée, ruine jetée à l’ingratitude et aux ronces, adresse perdue et dérisoire. Elle n’a pourtant pas démérité.

Quelques fleurs tentent de la consoler, en pauvres éclats de soleil.

Et l’on se surprend à vouloir les aider.

                              Marie-Christine Bernard – Juin 2019