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Déconfinement : « Que faut-il dire aux hommes ? », l’émouvant questionnement de Français croyants à voir au théâtre à partir du 19 mai

Comment s’attrape le virus de la spiritualité, qu’est-ce que ça donne en plus, c’est quoi le bonus de ceux qui croient ? Dans « Que faut-il dire aux hommes ? » Didier Ruiz poursuit son questionnement sur notre société en donnant la parole sur scène à de simples citoyens « croyants ». Un beau moment de partage à découvrir dès le 19 mai.

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France Télévisions Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min.
"Que faut-il dire aux hommes ?" de Didier Ruiz (Emilia Stéfani-Law)
« Que faut-il dire aux hommes ? » de Didier Ruiz (Emilia Stéfani-Law)

Après les personnes transgenres, les personnes âgées, les ex-détenus, souvent invisibles aux yeux du monde, Didier Ruiz poursuit sa collection de portraits en s’interrogeant cette fois sur un autre invisible, celui de la spiritualité. Un spectacle à découvrir dès le 19 mai.

Quand Grace sort de l’ombre et s’avance c’est plutôt sur le ton de l’agacement qu’elle ponctue le récit de sa vie familiale au Kenya : une vie rythmée par la prière, les rituels religieux. Mais il y a aussi ce souvenir précieux : chez elle il y avait toujours une place pour l’autre, qu’il soit accueilli pour un repas ou pour plusieurs années.

7 témoins

Ils sont ainsi sept à raconter leur parcours, cinq hommes et deux femmes venus d’horizons très divers. Brice, frère et père dominicain, vit dans un couvent après avoir longtemps dirigé une galerie d’art contemporain à Paris, Marie-Christine qui a quitté sa congrégation et fait du coaching, Jean-Pierre, ancien avocat et juif pratiquant, Adel, artiste plasticien qui a une vision très personnel de l’islam, Grace qui a quitté l’Afrique pour faire son droit à Paris. Et puis il y a Eric, bouddhiste, qui travaille pour des ONG et Olivier qui pratique le chamanisme et rend sensible les mondes invisibles.

Une parole jamais figée, évolutive

« On s’assoie, on parle, on questionne et on requestionne pour être le plus clair possible nous détaille Didier Ruiz à la MC93 de Bobigny. Qu’est-ce que ça veut dire les mondes invisibles dont parle Olivier ? Ce sont des sortes de rêves… Et là tout de suite on comprend. Ça nous donne accès à cette autre réalité. Nous avons travaillé individuellement d’abord, puis tous en groupe pour que la parole se sacralise dans le cadre du théâtre, qu’elle ne soit plus dans le quotidien ». Et c’est une parole qui au fil des représentations ne sera jamais figée, qui restera libre, évolutive mais précise. Résultat : les courts monologues s’enchaînent avec fluidité dans une mise en scène sobre et chorale qui rend palpables les liens tissés par le groupe.

Didier Ruiz ancre avec habileté et finesse ces parcours dans notre quotidien. Grace, heureuse à Paris, ressent pourtant un vide grandissant, jusqu’à ce qu’elle se rende chez Gibert Jeune acheter une Bible. Et puis un jour au cours d’une de ses lectures cet émerveillement : ce ne sont plus des mots sur une page, mais la parole de Dieu qui résonne en elle.

« Mise à nu »

Des parcours semé de doutes et d’embûches : en désaccord avec la rigidité du rabbin, Jean-Pierre s’enfuit lors de sa barmitsva et renoue avec sa religion bien des années plus tard. Malgré ses changements de vie Marie-Christine est persuadée que ce qui compte pour Dieu c’est elle, « Dieu est de mon côté » se réjouit-elle, elle qui s’est si longtemps rabaissée. Olivier le chamane avoue avoir plongé dans ses peurs avant d’en avoir tiré une philosophie de vie. Quant à Adel il donne ainsi sa définition du mot musulman : « homme des âmes ». Et de s’interroger sur un paradis que sa religion promet rempli de femmes et d’alcool ; lui se réfère à une autre description trouvée dans les textes et qui décrit un lieu plein de couleurs extraordinaires. « Si ces couleurs sont vraies, alors je suis prêt à aller au paradis » glisse-t-il dans un sourire. Brice le Dominicain évoque les orages, les tempêtes qu’il a traversées jusqu’à parfois la transgression de ses vœux, « quand j’en suis là, je me blesse moi-même ». Et de s’étonner après le spectacle d’être capable d’une telle mise à nu : « je peux vous parler et vous vendre Jésus, mais ce que je fais là je ne l’ai jamais fait, je ne suis jamais allé aussi loin ».

Ce qui frappe dans l’aboutissement de leur parcours, c’est la liberté gagnée. Et lorsqu’ils se mettent à prier de façon si différente, on ressent surtout ce qui les relie en dehors de toutes tentatives de prosélytisme. « La première de Que faut-il dire aux hommes ? a eu lieu le 15 octobre, le 16 octobre Samuel Paty était assassiné, je me suis dit que ce spectacle avait une vraie vertu, un vrai sens. Si l’assassin de Samuel Patty l’avait entendu, peut-être que le lendemain il serait allé faire ses courses au supermarché… » nous confie Didier Ruiz.

Quant à Brice, Marie-Christine, Grâce, Adel, Jean-Pierre, Eric et Olivier ils se réjouissent de partir enfin tous ensemble en tournée.

Théâtre de La Bastille, Paris, du 19 au 21 mai 2021
Puis en tournée